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Avenir

Une physique nouvelle verra-t-elle le jour en l'an 2000 ?

Venus de neuf pays différents, de nombreux physiciens étaient réunis en août dernier à Stanford, Californie, pour l'inauguration officielle d'un nouvel observatoire de l'infiniment petit, installé au laboratoire de l'accélérateur de particules SLAC (Stanford Linear Accelerator Center). Depuis le 26 mai dernier, les désintégrations de mésons beaux*, des particules à la durée de vie éphémère, fruits de la collision frontale de faisceaux d'électrons et de leur antiparticule, les positons, s'y succèdent au rythme de quelques milliers par seconde. Par un patient travail de dépistage qui devrait prendre plusieurs années, les physiciens espèrent bien déceler dans ces désintégrations quelque indice de la faillite du tout-puissant modèle standard des particules et des interactions fondamentales, qui règne sans partage depuis une bonne trentaine d'années sur la physique des constituants élémentaires de la matière Car paradoxalement, devant les multiples confirmations expérimentales de ce modèle, les physiciens des particules finiraient presque par s'ennuyer ! D'où le tenace espoir placé dans cette nouvelle expérience, conçue pour explorer l'un des derniers domaines inconnus du modèle, celui de la violation d'une symétrie fondamentale en physique, la symétrie charge-parité CP. Dans le bestiaire des particules élémentaires, les mésons beaux arrivent en effet en tête des candidats susceptibles de violer cette symétrie. Et la compréhension de cette violation serait une étape clé dans la résolution d'une des grandes énigmes de la physique contemporaine, à savoir... l'existence même de notre Univers ou, plus exactement, l'absence d'antimatière dans l'Univers observable. Les processus élémentaires étudiés par la physique des hautes énergies, susceptibles de s'être déroulés dans les tout premiers moments de l'histoire de l'Univers, nous enseignent en effet que matière et antimatière sont toujours produites en quantité égale. Comment dans ce cas un univers de matière comme le nôtre a-t-il pu se développer ? Où est passée l'antimatière qui a dû être formée au moment du big-bang et qui devait, aux origines, préserver la symétrie du monde physique ? Pourquoi notre Univers est-il asymétrique ? Pour mesurer les asymétries attendues avec des erreurs de 10 % ou mieux, il sera nécessaire d'observer des dizaines de millions de paires B0d B-0d. Depuis le démarrage de BABAR et de BELLE cependant, les performances obtenues, tant par ces accélérateurs d'un type nouveau que par les détecteurs associés, montrent que cet objectif sera atteint avant la fin de l'année 2000. Si la course est ouverte entre ces deux usines à B, d'autres compétiteurs se profilent à l'horizon 2000 : l'expérience HERA-B au laboratoire DESY à Hambourg (Allemagne) et les expériences CDF et D0 au laboratoire Fermi à Chicago (Etats-Unis). Les usines à B ont l'avantage de couvrir tout un programme de mesures permettant de contraindre l'explication de la violation de CP proposée par le modèle standard. Celui-ci expliquera- t-il l'ensemble des résultats escomptés ? Ces prochaines années verront-elles s'ouvrir enfin une porte sur une physique nouvelle ?

La Recherche : novembre 1999 http://www.larecherche.fr/VIEW/325/03250751.html

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