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Edito : La mortalité par cancer continue de reculer

Selon "L'état des lieux sur la survie des patients atteints de cancers en France" publié par l'INCa (Institut national du cancer), le 22 avril, 320.000 Français sont victimes d'un cancer chaque année mais la moitié (53 %) y survivent au moins 5 ans et 120.000 en guérissent totalement.

Ces données sont issues du suivi de patients ayant été victimes d'un cancer avant l'an 2000 et il est probable qu'avec les nouveaux traitements mis au point depuis 10 ans, le taux de survie moyen pour les malades actuels ait encore augmenté. Comme le souligne le Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l'Institut national du cancer, «Nous assistons à un processus d'amélioration du taux de survie après cancer de l'ordre de 10 % par décennie, si l'on se réfère aux enquêtes antérieures».

Cette bonne nouvelle vient pleinement confirmer une évolution à long terme constatée par de nombreuses études solides, tant au niveau national qu'international. L'Institut de Veille Sanitaire (InVS), avait ainsi publié en 2009 un recueil très complet sur l'évolution de l'incidence et la mortalité par cancer en France de 1980 à 2005.

Cette étude montrait que chez l'homme, la mortalité par cancer diminuait depuis 1989 de 1,5 % par an. Cette diminution résulte surtout de la baisse de la mortalité par cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS), de la prostate, du poumon, de l'intestin et de l'estomac, et s'observe malgré l'augmentation de la mortalité par cancer du foie, de la peau et du pancréas.

Chez la femme, la mortalité diminue depuis 1963, et plus rapidement de 0,7 % par an depuis 1989. Cette diminution résulte surtout de la baisse de la mortalité par cancer de l'intestin, du sein, de l'estomac et de l'utérus, et s'observe malgré l'augmentation de la mortalité par cancer du poumon, du pancréas et de la peau.

Ces données de l'Institut de Veille Sanitaire (InVS) montrent que depuis 1980, l'incidence des cancers a quasiment doublé chez l'homme (+93 %) et fortement augmenté chez la femme (+84 %). Mais ces données confirment également que la mortalité par cancers en France est en nette diminution, si l'on tient compte de l'augmentation et du vieillissement de la population.

L'InVS souligne très justement que le nombre de personnes décédées d'un cancer en 2005 est certes supérieur de 13 % à celui de 1980. Mais il souligne que « cette augmentation est très inférieure à celle prévue par l'accroissement et le vieillissement de la population (37 %) ». Ramené à l'augmentation de la population, le risque de mortalité par cancer a bel et bien chuté au cours de ces 25 dernières années : de 29 % chez l'homme et de 22 % chez la femme.

Cette diminution de la mortalité par cancer n'est pas propre à la France. Les statistiques américaines montrent que le taux de mortalité par cancer a baissé de 2,1 % par an depuis 2002. C'est deux fois plus que la baisse annuelle de 1,1 % enregistrée dans ce même pays entre 1993 et 2002. Fait encore plus remarquable, depuis 7 ans, la mortalité par cancer baisse en valeur absolue aux Etats-Unis et a retrouvé le niveau des années 30 dans ce pays alors que la population américaine a considérablement augmenté et vieilli depuis 70 ans.

Cette tendance se retrouve également au niveau européen : une étude publiée dans Annals of Oncology montre en effet que le taux de mortalité par cancer a en effet diminué de 8 % depuis 10 ans. L'incidence des cancers a atteint un pic en 1998, pour diminuer progressivement, selon l'équipe de chercheurs dirigée par Carlo la Vecchia, Directeur de l'unité d'épidémiologie à l'institut Mario Negri en Italie.

Cette étude montre que le nombre de décès pour 100 000 hommes est passé de 185 à 168 et celui pour 100 000 femmes de 104,8 à 96,9 entre 2000 et 2004. Cette baisse du taux de mortalité chez les hommes est liée à la baisse des cancers du poumon et une baisse des cancers colorectaux. La détection des cancers du col de l'utérus, du sein et les traitements ont baissé le taux de mortalité des cancers chez les femmes.

Si l'on extrapole cette tendance constatée depuis 30 ans, il n'est pas déraisonnable d'espérer que d'ici 10 ans, au moins deux cancers sur trois pourront être guéris et du moins contrôlés.

Mais sans nier bien entendu ces remarquables progrès intervenus au cours de ces dernières décennies en matière de diagnostic et de thérapeutiques, faut-il tout attendre des avancées de la médecine et de la biologie pour vaincre définitivement le cancer ? Incontestablement, la réponse à cette question est non et de récentes études rigoureuses nous montrent à quel point les politiques de santé axées sur la prévention et les comportements individuels en matière de modes de vie peuvent avoir un impact considérable en matière de cancer.

Une étude norvégienne publiée le 26 avril dans les Archives of Internal Medicine et portant sur 4 800 personnes suivies pendant 20 ans, montre ainsi que fumer, boire trop d'alcool, ne pas faire assez d'exercice et manger insuffisamment de fruits et légumes triplent le risque de décéder d'une maladie cardiovasculaire ou d'un cancer.

Le Dr Elisabeth Kvaavik de l'Université d'Oslo, principal auteur de l'étude, souligne que " de modestes changements dans le mode de vie ont probablement des effets considérables bénéfiques à la fois au niveau individuel mais aussi sur l'ensemble de la population".

Cette étude confirme qu'en adoptant des mesures très simples d'hygiène de vie, il serait possible de faire baisser dans des proportions considérables (peut être 50 %), le nombre de nouveaux cas de cancer. Cela est d'autant plus vrai que, d'ici quelques années, la connaissance fine des prédispositions génétiques de chacun à développer tel ou tel cancer, permettra d'envisager une prévention active et personnalisée.

Il est donc capital, tout en maintenant l'effort de recherche à un niveau très élevé, de faire également un effort beaucoup plus important, dès la petite enfance, pour éduquer la population et informer nos concitoyens des bénéfices immenses qu'ils peuvent retirer pour leur santé en adoptant quelques règles de vie simples.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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