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Le Minitel, définitivement débranché en juin 2012

Il prendra sa retraite en juin 2012. Le Minitel, désormais obsolète, aura duré plus de trente ans. Retour sur la carrière de cette invention ancêtre de l'Internet.

Une page se tourne. France Télécom débranchera définitivement le Minitel le 30 juin 2012. S'il existe encore 800.000 appareils couleur châtaigne ou gris en circulation, l'opérateur est cependant incapable de distinguer ceux effectivement utilisés de ceux qui prennent la poussière dans le grenier.

À l'heure des tablettes et autres smartphones, on pourrait railler cette invention franco-française, qui n'a connu que des exportations mineures, en Suisse par exemple. Et pourtant, ce serait oublier qu'elle a constitué un véritable bond technologique !

Alors que l'informatique balbutiait à peine, le rapport sur « l'Informatisation de la société », coécrit en 1977 par Simon Nora et Alain Minc, lance la réflexion sur la télématique, cette fusion des télécommunications et de l'informatique. « À l'époque, les Français ne savaient pas ce qu'était un clavier ! La toute puissante Direction Générale des Télécoms (DGT, future France Télécom), un État dans l'État, a mené une action régalienne pour rattraper le retard du pays », se souvient François de Valence, ex-éditeur de services Minitel. La DGT voulait à l'origine créer un annuaire électronique, capable de se substituer aux 15 millions de Bottins à imprimer chaque année. Elle accouchera finalement du premier réseau interactif à grande échelle au monde.

Au départ, le premier prototype de Minitel n'est qu'un boîtier à brancher sur la télévision. Néanmoins, il aurait introduit une concurrence malvenue avec cette dernière. Télic-Alcatel, Matra (Lagardère) et Radiotechnique (Philips) sont donc choisis pour fabriquer les premiers modèles avec écran en 1982. Juste doté d'un clavier et d'un modem, le Minitel n'était pas équipé de microprocesseur. Il se contente d'afficher les données via une mosaïque de pixels gris, très limitée par sa résolution. Daniel Kaplan, à la tête d'une « Minitel agency » dans les années 1980, défend cette conception minimaliste : « Peut-être que le Minitel est aujourd'hui un dinosaure, mais les dinosaures étaient adaptés aux conditions de leurs temps ! » Une pique adressée aux premiers ordinateurs personnels, plus puissants mais plus compliqués d'utilisation.

Cette technologie élémentaire et robuste, couplée aux subventions massives de l'État, assure le succès du Minitel. Le pic de 6,5 millions de terminaux est atteint en 1995, soit 20 millions de personnes « connectées ». Outre l'annuaire en ligne très plébiscité, les Français découvrent en 1984 le Kiosque télématique. Jusqu'à 25.000 services y sont disponibles grâce aux numéros 3615, 16 ou 17. Flirter sur le Minitel rose, mais aussi s'inscrire à la fac, apprendre une langue étrangère, chercher un appartement, consulter son compte en banque ou encore acheter un billet de train, on goûte en France, avant l'avènement du Net, aux joies de la « révolution télématique ».

Pendant les années 1990, les « minitélistes » se connectent environ une heure et demie chaque mois à leur compagnon télématique. Mais France Télécom a en contrepartie freiné le développement de l'Internet, « pendant un ou deux ans », avance Daniel Kaplan. Et selon Marc Simoncini, autre pionnier du Minitel, cette vérité ne remet pas en cause tout l'héritage des années Minitel : « France Télécom a certes ralenti le virage numérique en France, mais le savoir-faire induit a été au contraire un accélérateur. Le Minitel fut en fait une formidable école et a contribué à la création d'une culture online en France. »

La Tribune

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  • MTC

    4/09/2011

    Retraitée de l'Enseignement Supérieur, je reçois avec bonheur vos résumés scientifiques qui me donnent l'impression de "rester dans le coup". Je tiens à remercier toute l'équipe pour cet excellent et combien utile travail ( de "bénédictin"!). A bientôt la joie de vous lire et merci! merci!

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