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Les médicaments attaquent en nanocapsule

La navette s'approche de la cellule cancéreuse, libère son chargement de médicament et se désintègre en quelques jours. Sa mission dans l'espace... intracellulaire est terminée. Applaudissements dans la salle. Cette capsule d'à peine un quart de micron a détruit une cellule malade qui résistait au traitement, sans intoxiquer le reste des organes. Ce scénario, Patrick Couvreur, pharmacologue au CNRS (1), l'a déroulé dans sa tête depuis plus de quinze ans. Aujourd'hui, ses efforts de recherche semblent prêts d'aboutir. Bio Alliance Pharma, une start-up de onze personnes, s'est installée le mois dernier à côté de son laboratoire et va démarrer des essais cliniques (phase II) sur ces nanoparticules renfermant un anticancéreux (la doxorubicine) utilisé dans le cas de leucémie aiguë résistante et les métastases hépatiques. A y regarder de près, ce minuscule livreur de médicament, baptisé "Transdrug", ressemble à "une pelote de laine dans laquelle sont dispersées des molécules actives", explique Patrick Couvreur. Injectées dans le sang, les nanoparticules sont recouvertes par des protéines du plasma. Ainsi "décorées", elles sont repérées par les macrophages du foie et de la rate, véritables éboueurs du corps humain, puis redistribuées vers les cellules cancéreuses. Là, elles libèrent progressivement leur cargaison de médicaments, au moment où leur gangue de polymère se dégrade. Premier avantage de ce transport indirect: les molécules du médicament ne se concentrent plus au niveau du coeur. La toxicité cardiaque est donc réduite. Mais, surtout, le médicament, libéré en forte concentration, fait fi des mécanismes de résistance de la cellule. En effet, la pompe cellulaire chargée de refluer tout élément toxique ne voit pas passer le médicament camouflé, qui pénètre sans peine au coeur de la cellule. De tels moyens de délivrer des anticancéreux commencent à se développer, notamment par l'intermédiaire des liposomes. Avec les nanoparticules, il s'agit d'une carte supplémentaire pour déjouer les mécanismes de résistance. "Si les évaluations cliniques sont concluantes, on espère une mise sur le marché d'ici à 2002", souligne Dominique Costantini, co-fondatrice de Bio Alliance Pharma. Sans plus attendre, Patrick Couvreur réfléchit déjà à des nanoparticules capables d'aller encore plus précisément à une adresse biologique pour y délivrer des médicaments.

Libération : http://www.liberation.com/quotidien/semaine/20000118marzj.html

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