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La France se dote d'un outil de recherche nucléaire unique au monde

La construction du réacteur de recherches Jules-Horowitz (RJH), le premier outil de recherche nucléaire de ce type construit depuis près de trente ans, a été lancée le 19 mars au centre du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) de Cadarache. "Le RJH apportera une capacité d'expertise modernisée nécessaire pour la France mais aussi l'ensemble de l'Europe", a déclaré le ministre délégué à l'Industrie François Loos en inaugurant ce chantier.

"C'est un instrument de recherche européen de premier plan qui soutiendra la filière nucléaire en Europe" et contribuera au respect de l'objectif de réduire de 20 % d'ici 2020 les émissions de gaz à effet de serre en Europe, a-t-il ajouté. D'une puissance de 100 mégawatts, le réacteur qui porte le nom d'un ancien directeur de la recherche fondamentale du CEA, avait reçu le feu vert de l'Etat en 2004. Il doit entrer en service en 2014 et "est d'autant plus stratégique que les réacteurs de recherche européens actuellement en service devraient être progressivement arrêtés dans les dix prochaines années", a souligné le ministre. Ces réacteurs ont plus de 45 ans d'âge.

Destiné à tester matériaux et combustibles des futures centrales nucléaires, RJH remplacera l'installation Osiris de Saclay (Essonne) afin de préparer la construction du prototype de réacteur de 4e génération prévu pour 2020. Les exploitants attendent en effet de ce réacteur de précieuses informations pour valider la prolongation de l'exploitation des centrales en activité jusqu'en 2050. Si les mécanismes de vieillissement de la cuve du réacteur sont désormais bien compris, il n'en est pas de même pour les parties internes du coeur, a expliqué directeur du projet Daniel Iracane.

Mais on s'intéressera surtout aux matériaux du futur, comme les céramiques, dont on pourra mesurer les caractéristiques mécaniques dans ces environnements extrêmes. Car, même si la simulation numérique a fait d'énormes progrès, elle ne permet pas de se passer complètement de l'expérimentation réelle.

Lors de la fission nucléaire, les neutrons dégagés viennent percuter les atomes des pièces de structure du réacteur, les déplaçant légèrement à la manière d'une boule de billard et fatiguant le métal à la longue. Dans une centrale du type de celles actuellement exploitées par EdF, chaque atome des pièces de structure est déplacé deux fois par an. Dans Osiris, c'est 5 à 6 fois par an. Dans le RJH, ce sera 15 fois par an. Les matériaux testés y seront donc beaucoup plus sollicités que dans les centrales nucléaires actuelles.

Durant la cérémonie, plusieurs partenaires industriels (EDF, Areva) et des instituts nucléaires européens (République Tchèque, Belgique, Espagne) ont signé un accord concrétisant leur participation au RJH. Le financement du projet - au total 500 millions d'euros - sera assuré à 50% par le CEA, à 20 % par les partenaires européens et internationaux, à 20 % par EDF et à 10 % par Areva. "Des discussions avec d'autres se poursuivent", a dit M. Loos, "je ne peux que les inviter à monter à bord".

La participation du Japon est en cours de finalisation et "nous avons la volonté d'élargir la participation européenne au projet", a expliqué à l'AFP le directeur du projet Daniel Iracane. Le réacteur permettra de développer des matériaux résistant notamment aux conditions extrêmes des réacteurs à fusion tels qu'Iter et des combustibles nucléaires innovants. Il produira aussi, comme les autres réacteurs de recherche, des radio-isotopes à usage médical dont il devrait assurer 25 % au moins des besoins européens.

"La relance du nucléaire dans le monde se confirme par l'annonce de la construction d'une trentaine de réacteurs dans une douzaine de pays au moins", a déclaré l'administrateur général du CEA Alain Bugat, soulignant le rôle du RJH pour former de nouvelles générations d'ingénieurs et techniciens nucléaires.

"Si l'Europe veut continuer à jouer un rôle de leader dans la recherche et le développement nucléaire ainsi que sur la scène industrielle, nous avons absolument besoin de développer des nouveaux réacteurs de recherche", a observé Frank Deconinck, président de la European Nuclear Society, pour qui la diversité des applications du nucléaire - énergie, thérapie médicale, dessalement de l'eau ou production d'hydrogène - assure son avenir. Les retombées économiques seront d'importance pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur qui captera "près des deux tiers des dépenses du projet", selon M. Loos. "Avec Iter et aujourd'hui le RJH, le site de Cadarache devient l'un des plus grands centres européens de recherche sur les énergies non génératrices de gaz à effet de serre", a-t-il conclu.

CEA

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