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Découverte d'une nouvelle "brique" de la vie

Le grand livre de la vie s'écrit avec une syllabe de plus. Autrement dit, un nouvel acide aminé naturel, la pyrrolysine, mis au jour par deux équipes américaines de l'université de l'Ohio, dans un micro-organisme producteur de méthane, Methanosarcina barkeri, appartenant au domaine des archaebactéries. Selon les auteurs de la découverte, publiée dans la revue Science, il s'agit du vingt-deuxième acide aminé répertorié à ce jour. Mais pour Philippe Marlière, de la société de biotechnologie Evologic, basée au Génopole d'Evry, ce pourrait être le vingt-troisième si l'on ajoute à cette liste la formylméthionine identifiée dès les années soixante par Jim Watson, codécouvreur avec Francis Crick de la structure de l'ADN (acide désoxyribonucléique), support de l'hérédité. Les acides aminés sont comparables à des perles qui, mises bout à bout dans un ordre ou une séquence déterminée,forment des colliers plus ou moins longs, étirés ou repliés sur eux-mêmes. Ces longues chaînes sont les protéines : des molécules indispensables à la vie, impliquées dans la plupart des réactions biochimiques. Les enzymes, les hormones sont des protéines, comme d'ailleurs les constituants de base de l'organisme (muscle, os, nerf, etc.). Il existe une très grande variété d'acides aminés, sur Terre ou dans l'espace, en particulier dans les micrométéorites (des poussières cosmiques de quelques microns) dont notre planète est abondamment et régulièrement bombardée. Mais seul un petit nombre d'entre eux participent à l'élaboration des protéines du vivant. Lorsque le code génétique fut décrypté, à la fin des années soixante, les biologistes n'en recensaient que 20. Pas un de plus. Il s'agit, pour les plus connus, de la lysine, de la méthionine, de la cystéine ou encore de la proline. À chacun de ces acides aminés correspond un ou plusieurs « codons » ou « triplets », c'est-à-dire trois des quatre bases nucléiques A, T, C, G (pour adénine, thymine, cytosine, guanine) disposées le long de la molécule d'ADN, selon une séquence déterminée propre à chaque individu. C'est le principe essentiel de l'hérédité : que l'on soit homme, tigre, marguerite ou papillon, toutes nos cellules fabriquent ainsi leurs propres protéines (dont certaines sont communes à l'espèce) en suivant à la lettre les instructions contenues dans le « plan de montage » stocké dans l'ADN des gènes. Mais, comme toujours, la réalité est plus complexe. En 1986, des chercheurs découvrent chez des bactéries qu'un vingt et unième acide aminé, la sélenocystéine, peut être directement codé par le triplet UGA (1). Ce dernier est la transcription sur un brin d'ARN (acide ribonucléique) messager, molécule utilisée pour véhiculer l'information génétique à l'intérieur de la cellule, de la séquence ACT qui a été « lue » sur la portion d'ADN correspondante. Or le triplet UGA était connu jusqu'à présent pour déclencher la fonction « stop », la fin de l'enfilage de perles. Donc, pour signifier à la cellule que la protéine en cours de fabrication est achevée. Et rien d'autre. Le fait que ce codon puisse avoir une deuxième fonction qui consiste, occasionnellement, à insérer une molécule de sélenocystéine sur une chaîne protidique, fut une découverte retentissante. En montrant que la pyrrolysine, présente dans le site actif d'une enzyme de M. barkeri (la methogénique methylamine méthyltransférase), impliquée dans la biosynthèse du méthane, est le deuxième, voire le troisième acide aminé « non canonique » connu à ce jour (par rapport aux 20 acides aminés « canoniques » identifiés à l'origine), les travaux menés par les équipes de Joseph Krzycki et Michael Chan viennent d'accréditer cette semaine la thèse d'un code génétique plus riche, plus porteur d'informations que ce que l'on imaginait.

Figaro : http://www.lefigaro.fr/sciences/20020525.FIG0156.html

Science du 24 mai 2002 :

http://www.sciencemag.org/cgi/content/abstract/296/5572/1459

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