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Edito : Dans un avenir, maintenant proche, chacun produira l’énergie dont il a besoin

Lors du long débat présidentiel qui vient de se clore, aucun candidat n’a abordé, sur le fond, la véritable et fondamentale évolution de l’accès à l’énergie, dans ces prochaines décennies.

Certes, il fut souvent question du nucléaire, mais seulement abordé sur un mode polémique pour traiter de ses dangers suite à Fukushima.

Or, après la foudroyante évolution des réseaux, dans ce dernier quart de siècle, je suis convaincu, et je l’ai déjà affirmé à plusieurs reprises dans RT Flash, que notre façon d’accéder à l’énergie, dans ces prochaines décennies, va progressivement abandonner les grands réseaux pyramidaux actuels : de la centrale nucléaire, hydraulique ou thermique, à l’utilisateur final, de la raffinerie à l’automobile pour s’orienter vers la micro production individuelle d’énergie dans nos maisons, nos appartements, nos bureaux, nos locaux commerciaux ou nos ateliers.

Dans les années 1970, des conglomérats très puissants, comme IBM, pensaient atteindre le « graal » en concentrant, dans des calculateurs de plus en plus gros, les données nourrissant des milliers d’écrans fonctionnant en grappes. Il a suffi, alors, que des Steve Jobs, des Bill Gates aient eu l’audace de lancer l’Apple I ou le PC, pour que l’ensemble architectural pyramidal des ces gros mainframes soit moins opérationnel et surtout moins pertinent.

Or, rien ne nous interdit aujourd’hui d’affirmer que l’accès à l’énergie, pour chacun d’entre nous, va suivre la même voie.

Certes, ce ne sont pas les gros conglomérats actuels de l’énergie (EDF et TOTAL en France) qui inciteront nos politiques à poser ces nouveaux schémas pour l’avenir.

Mais les informations que nous diffusons, semaine après semaine, dans RT Flash, nous permettent d’affirmer que cette micro production d’énergie, au niveau de l’unité individuelle de vie, devient de plus en plus crédible.

Pour bien vous faire partager ma conviction, permettez-moi de vous rappeler le sens des mots : « vecteur d’énergie ». Un vecteur d’énergie permet de transporter ou de stocker l’énergie. Les deux vecteurs d’énergie les plus utilisés actuellement sont l’électricité et les carburants (essence ou gasoil). Le vecteur d’énergie de la future micro production d’énergie ne sera plus l’électricité ni un carburant, mais l’hydrogène.

Le producteur individuel d’énergie pourra se fournir en hydrogène, soit en le fabriquant lui-même, j’y reviendrai dans quelques instants, soit en l’achetant sous forme solide (hydrures) ou liquide (borazane).

Le particulier qui achèterait cet hydrogène s’en servirait soit pour produire de l’électricité, en passant par une pile à combustion (PAC), mais aussi pour faire fonctionner son automobile.

Les Japonais, qui sont nettement en avance sur la France, dans cette nouvelle économie de l’hydrogène, ont déjà mis sur le marché plusieurs piles à combustible destinées aux particuliers.

Par ailleurs, Toyota vient d’annoncer, au Salon de l’Automobile de Genève (après Mercedes), qu’il produirait, en grande série, en 2020, des voitures à hydrogène pour Monsieur Toutlemonde.

Cette solution transitoire d’achat de l’hydrogène, sous forme solide ou liquide, permettrait, pendant quelques décennies, d’utiliser les centrales non polluantes en CO², déjà en place, pour fabriquer cet hydrogène par électrolyse massive de l’eau.

Mais, inexorablement, l’individu voudra produire lui-même son hydrogène.

En effet, il ne voudra pas rester prisonnier, comme il l’est actuellement, des producteurs monopolistiques des vecteurs d’énergie, que ce soit l’électricité, le gaz ou les carburants. Il souffre trop, surtout actuellement, de voir sa facture de carburant, de gaz ou d’électricité augmentant mois après mois sans qu’il puisse faire jouer la concurrence pour peser sur les prix. Inévitablement, si le développement de nouvelles technologies lui permet, à des prix raisonnables, dans un automatisme total et en toute sécurité, de produire lui-même son énergie, le particulier choisira alors massivement cette voie nouvelle.

Or, en observant ce qui se passe actuellement dans de très nombreux laboratoires, dans le monde entier, je suis convaincu, que dans moins d’une décennie, chacun d’entre nous aura la possibilité, soit avec le soleil, soit avec la photosynthèse, soit avec le vent, soit avec des bactéries, soit avec de la biomasse, de produire, à des coûts très faibles, de l’hydrogène en séparant les atomes d’hydrogène et d’oxygène de l’eau.

Ainsi serait close la période pénible de la totale dépendance du consommateur envers un méga système monopolistique de distribution d’énergie.

La généralisation de cette production individuelle de l’hydrogène, en partant de l’eau, généralisation qui devrait demander un siècle au moins, est la meilleure réponse que pourrait apporter l’humanité au grave problème du réchauffement climatique.

En effet, à condition, bien entendu, que cet hydrogène soit obtenu avec des moyens naturels, à partir de l’eau et non en partant de pétrole, les rejets en CO², pour les déplacements, pour le chauffage, pour faire tourner les machines, pour s’éclairer, deviendraient nuls, ce qui ramènerait, pour cette pollution aux effets gravissimes, notre Terre à l’ère préindustrielle.

J’ai bien conscience combien l’annonce d’un tel avenir peut passer pour un rêve, tant l’arrivée d’une économie hydrogène bouleverserait les piliers de fonctionnement actuel de nos sociétés : Imaginez-vous une société sans pétrole, sans gaz, sans charbon, sans nucléaire, mais seulement avec de l’eau, du soleil, du vent et de la biomasse.

La réalisation de ce rêve changerait l’avenir de l’Humanité !

René TRÉGOUËT

Sénateur Honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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  • regis servant

    11/05/2012

    Merci pour cette parfaite présentation d'un futur réaliste ou la production autonome de l'hydrogène permettra de résoudre le problème du stockage des énergies douces pour alimenter nos véhicules, nos habitations, nos bureaux, ateliers, usines, magasins, rues ... A l'image de la révolution électronique on peut imaginer les réseaux libres de production et d'échange face aux lobbies centralisateurs lutant contre les investissements mutualistes.
    EDF , GDF, TOTAL, AREVA ... feront-il ce qu'a fait IBM qui en inventant le PC ont donné un fantastique coup d'accélérateur à la micro informatique, et donc en inventant les mini et micro centrales de production et stockage d'hydrogène? Il est bien certain que nombre de ces méga entreprises freinera au maximum et le plus longtemps possible cette "atomisation" (le mot est mal choisi) De quel côté sera l'Etat, inventera t il une sorte d'hadopi de l'energie ? Ou favorisera-t-il les futures inventeurs de la Personelle-Energie à l'image des Apple, Google, Microsoft, FB ?
    Ou en est la recherche (publique et privée) en France et en Europe dans ce secteur ?

  • Rene TREGOUET

    13/05/2012

    Bien que de grands instituts de recherche français aient publiés d'excellents articles sur l'énergie hydrogène, notre Pays accuse malheureusement un très grand retard dans le développement de la Pile à Combustibles (PAC).
    Les entreprises françaises qui veulent innover et produire de nouveaux produits dans ce domaine sont beaucoup moins aidées que leurs concurrentes allemandes ou japonaises.

  • JérémyL

    13/05/2012

    Bonjour,

    Je trouve le concept intéressant bien qu'il nécessitera beaucoup beaucoup de temps, avec les complications "attendues", sachant que les industries majeures de l'énergie ne laisseront pas leur principale source de revenus se "répartir" et donc feront tout pour retarder cela.

    Autant je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'analogie maladroite avec le monde des ordinateurs. Vous avez entendu parler du cloud computing. Et en très vulgarisé, qu'est-ce donc? Une architecture centralisée où les utilisateurs stockent et utilisent leurs données, avec une faculté d'adaptation dynamique en plus (les technologies ayant évolué, il n'y a plus de problème de place ou de manque de ressources, quasiment), ainsi que d'échange.
    Donc nous sommes en train de revenir d'un modèle où tout s'était réparti, à peu près (les PC actuels) à un modèle centralisé de nouveau, bien plus intéressant pour les grandes sociétés (facteur d'échelle, analyse des utilisations et données, mise en place d'abonnements, limitation de la possibilité de changement entre fournisseurs, etc.).

    Et si on reste dans cette analogie, on pourrait penser à la même chose: une fois que tout le monde produit son énergie, certains auront des besoins plus importants que la moyenne, et donc devront l'acheter à d'autres, il pourra être compliqué "d'échanger" de l'énergie car chacun aura une solution (oui, moi j'utilise du 24V, moi du 12V, moi du 220V, moi du triphasé, etc.).
    Donc en restant dans cette analogie, la situation que vous évoquez ne durera qu'un temps?

    Je pense aussi que l'hydrogène peut être une solution intéressante sur le long terme, mais j'ai du mal à croire que ce modèle réparti fonctionnera de manière majoritaire.
    Enfin, il y a aussi le facteur de l'augmentation de la consommation d'énergie à prendre en compte. Un des pays dont les besoins énergétiques ont une croissance folle, la Chine, aura besoin de bien plus d'énergie dans quelques décennies que maintenant, et la production d'hydrogène parviendra-t'elle a la fournir?

  • Rene TREGOUET

    13/05/2012

    Merci pour votre analyse tout à fait pertinente.
    Par ailleurs, vous avez tout à fait raison. Mon analogie avec le développement de la micro informatique peut être mal interprétée.Pour moi cette analogie repose sur une image.Celle du pouvoir acquis par l'utilisateur final de disposer sur son PC de tous les logiciels lui permettant de gérer comme il le désire toutes les données qu'il veut y stocker. Dans la production individuelle d'hydrogène , je voudrais donner la même capacité à l'utilisateur final de gérer sa production d'énergie comme il le désire...

  • Acta Terra

    13/05/2012

    Merci Sénateur,

    Une vision d'avenir, objective, rationnelle.
    aux États Unis, 1200 distributeurs d"énergie achètent de l'énergie localement, afin de réduire les investissements structurels de transport.

    ci-joint une étude américaine sur la production d'énergie distribuée, validée par le NREL (National Renewable Energy Laboratory), Pike Research, ...
    http://www.newrules.org/energy/publications/democratizing-electricity-sy...
    http://www.newrules.org/sites/newrules.org/files/democratizing-electrici...

    cette étude met en avant la rentabilité économique et technique avérée
    de la production décentralisée.

    réduction des couts structurels de transformation
    réduction des pertes électriques de transformation
    réduction des couts structurels de transport
    réduction des pertes électriques de transport
    ...
    suppression des phénomènes de blackout
    réduction de la dépendance institutionnalisée
    ...
    régulation par le phénomène de foisonnement
    régulation par la diversification des sources
    régulation par les smart grids et les nouveaux systèmes de stockage
    développement de l'économie et de l'emploi

  • TREGOUET René

    14/05/2012

    Bonjour,

    Merci pour l'attention que vous avez portée à mon édito.
    Comme vous m'y invitiez , je suis allé sur le site http://www.ilsr.org/energy/publications/democratizing-electricity-system...
    J'invite tous les lecteurs de RT Flash qui sont intéressés par la production individuelle d'énergie à se rendre sur ce site.
    Ils en apprendront beaucoup plus que par la simple lecture de mon article.

  • mehdi

    15/05/2012

    J'ai juste une petite réserve concernant l'hydrogène. Tout d'abord l'utilisation de piles à combustible pour le transport n'est pas viable dans l'état actuel des choses pour le particulier pour plusieurs raison : La première, est l'utilisation massive de métaux précieux comme catalyseurs, tant que cette limite n'est pas franchie, on est dans l'incapacité physique de produire assez de piles à combustible. Ensuite, la production d'hydrogène chez le particulier me semble irréalisable car c'est un produit extrêmement difficile à stocker et de plus il présente des risques non négligeables pour les personnes qui le stockeraient. Et une dernière réserve concerne la méthode de production de l'hydrogène, la plus "propre" étant l'hydrolyse de l'eau qui nécessite (entout cas pour l'instant) de l'EAU DOUCE ce qui n'est éthiquement et durablement pas inenvisageable.
    Je suis désolé de ne pas abonder dans votre sens mais je pense que vous êtes trop optimiste concernant l'hydrogène en tant que vecteur d'énergie, qu'il soit brulé ou qu'il serve pour des piles à combustible.

  • TREGOUET René

    15/05/2012

    Bonjour,
    Depuis plusieurs années, RT Flash a repris des centaines d'articles qui montrent combien sont nombreux les laboratoires dans le monde qui actuellement travaillent pour améliorer les piles à combustibles et rendre plus facile et moins dangereux le stockage de l'hydrogène.
    Vu les annonces faites par les chercheurs ces problèmes seront résolus avant 2020, échéance que je fixe dans mon édito.
    Ainsi, à titre d'exemple, une petite société française, fort innovante, la Société MacPhy (sise dans la Drôme) sait déjà fabriquer des galettes solides d'Hydrures qui permettent de stocker de grandes quantités d'hydrogène sans danger. Demain chacun d'entre nous pourra fabriquer, pour des prix très accessibles, ces galettes d'hydrures d'Hydrogène.
    Il suffira de mettre ces galettes dans la Pile à Combustible et nous fabriquerons alors toute l'énergie dont nous aurons besoin...

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