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Edito : De Corot à Darwin : la recherche d'une autre terre entre dans une phase décisive

Le satellite français Corot est enfin parti à la recherche d'exoplanètes. Corot, qui a pour principale mission de détecter des planètes extrasolaires qui pourraient ressembler à la Terre, a décollé le 27 décembre à bord d'un lanceur russe Soyouz du cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan). Le satellite a été placé sur une orbite survolant les pôles de la Terre à 896 km d'altitude.

Equipé d'un télescope de 30 cm de diamètre, Corot, (acronyme de COnvection, ROtation des étoiles et Transits des planètes extrasolaires), a été initialement conçu pour analyser les variations lumineuses des étoiles, grâce à la mesure de leurs vibrations appelée sismologie stellaire.

Mais sa mission a ensuite évolué vers la recherche d'exoplanètes après la découverte en 1995 par deux scientifiques suisses de la première planète gravitant autour d'une autre étoile que le Soleil, 51 Pégase b. Depuis une dizaine d'années, les astronomes ont détecté, jusqu'ici uniquement à partir du sol, plus de 200 exoplanètes, géantes gazeuses ou planètes "solides" moyennes.

Le projet a été lancé par le Centre national d'études spatiales (CNES) au milieu des années 1990. Son coût relativement modeste, évalué à 170 millions d'euros, est assuré à plus de 60 % par la France. La mission Corot marque la première tentative de détection à partir de l'espace de "petites" planètes rocheuses, situées hors du système solaire. Le projet Corot conforte l'excellence de la France en astrophysique et devance la mission américaine Kepler, qui doit décoller en 2008 et va disposer d'un budget et de performances supérieurs à Corot.

Pendant les deux ans et demi de sa mission, Corot va notamment s'attacher à découvrir des planètes de petites tailles, plutôt rocheuses, en orbite autour d'autres étoiles que le Soleil. Cette présence est détectable par la diminution de l'intensité lumineuse d'une étoile lors du passage d'une exoplanète. Depuis son orbite à 900 kilomètres au-dessus de la Terre, Corot devra mesurer d'infimes variations de la luminosité de 120.000 étoiles.

A l'origine du projet, au début des années 90, le projet Corot a d'abord été élaboré pour obtenir des informations sur la composition du coeur des étoiles. Lorsqu'il braquera ses instruments sur une étoile, COROT pourra notamment observer des « séismes stellaires », ces ondes acoustiques provenant des profondeurs de l'étoile qui se propagent à la surface de celle-ci, modifiant sa luminosité. La nature de ces vibrations permettra aux astronomes de déduire avec précision la masse, l'âge et la composition chimique des étoiles.

Mais après la découverte des premières planètes extra-solaires en 1995, les responsables de la mission ont réalisé que les mêmes instruments pouvaient être aussi utilisés pour détecter des planètes lointaines. Corot devrait ainsi permettre de détecter des dizaines de petites exoplanètes, plus petites que les quelque 220 connues à ce jour. Ces dernières sont généralement d'énormes planètes gazeuses tournant en quelques jours rapidement autour de leur étoile.

La mission est prévue pour durer deux ans et demi. Le temps pour Corot de faire ses preuves, avant le lancement de la sonde américaine Kepler, annoncé pour fin 2008. Plus puissante, et affranchie du voisinage terrestre (elle sera placée en orbite autour du Soleil), Kepler a été calibrée pour aller chercher des planètes de la taille de la Terre.

Dans le prolongement scientifique de COROT, le projet spatial Darwin de l'Agence spatiale européenne, qui prévoit de mettre en orbite une flottille de 6 télescopes de 1,5 m de diamètre, devrait permettre, vers 2015, d'étudier de nouvelles planètes extrasolaires et d'y découvrir d'éventuelles traces de vie primitive. Il s'agit d'un nouveau type de télescope placé dans l'espace.

Les méthodes utilisées aujourd'hui, pour trouver les exoplanètes restent des méthodes indirectes : ces planètes sont actuellement détectées par le mouvement qu'elles induisent sur leur étoile ou par l'observation des effets qu'elles produisent sur l'astre lui-même. Avec Darwin, l'observation sera directe. Il s'agira de séparer le flux lumineux d'une planète et de son étoile centrale afin de procéder à une spectroscopie de l'atmosphère d'une planète de l'ordre de quelques masses terrestres. Il sera ainsi possible de détecter la présence de CO2, d'eau, d'ozone et donc d'oxygène. Or, la présence simultanée de CO2, d'oxygène en grande quantité et d'eau, serait un bon indicateur de la vie.

Darwin représente un véritable défi technique puisqu'il sera capable, grâce à son coronographe interférométrique, de détecter un objet 10 millions de fois moins lumineux que son étoile centrale. Cela revient à observer depuis Paris un ver luisant à 30 cm d'un phare situé à Marseille. Le coronographe interférométrique permettra "d'éteindre" la lumière du soleil proche de la planète à observer grâce un système optique qui met en opposition de phase plusieurs rayons lumineux corrélés arrivant sur plusieurs télescopes.

S'appuyant sur les observations et les enseignements de Corot, la mission Darwin devrait donc permettre, d'ici 10 ans, d'apporter les premiers indices à cette question fondamentale et fascinante : la Vie est-elle une exception terrestre, résultant d'un concours unique de circonstances ou est-elle, au contraire, un phénomène banal dans l'Univers ? Quelle que soit la réponse à cette question, elle éclairera d'une lumière nouvelle l'apparition et le développement de la vie sur notre propre planète ainsi que la place et le destin de l'homme dans le Cosmos.

René Trégouët

Sénateur honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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