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Le corail, des eaux du lagon aux os humains

Les chercheurs du laboratoire CNRS de recherche orthopédique lui ont promis une atmosphère quasi tropicale, une température à 37 °C particulièrement constante. Mais le corail blanc marin, du genre Porites habitué aux lagons, risque quand même d'être très dépaysé. Coincé entre deux bouts d'os humains, la barrière de corail de Nouvelle-Calédonie va lui sembler loin. Hervé Petite et son équipe espèrent en faire le prochain matériau de choix pour la reconstruction de pertes osseuses massives. Car si la plupart des fractures se réparent spontanément, «nous sommes parfois confrontés à des traumatisés qui ont perdu une portion d'os, voire un os entier, après un cancer par exemple», explique Laurent Sedel, chirurgien orthopédique à l'hôpital Lariboisière de Paris. «Pour l'instant, il est difficile de trouver des matériaux de remplacement valables». Or, «l'architecture du squelette de corail Porites est très propice à la repousse osseuse», explique Hervé Petite. Si toutes les espèces de coraux ne sont pas utilisables, le Porites a des propriétés uniques: une composition à base de carbonate de calcium, facilement résorbable au cours du temps; une bonne résistance à la compression; un réseau de pores connectés les uns aux autres, où les vaisseaux sanguins peuvent pénétrer facilement. Et «bizarrement, une assez bonne tolérance par le système immunitaire de l'homme», ajoute Laurent Sedel. Mais, greffé seul sur un os gravement endommagé, le corail ne répare rien. Les chercheurs lui ont donc ajouté les cellules souches de la moelle, capables de se transformer en cellules osseuses. Résultat: les scientifiques sont parvenus à reconstruire complètement, sur 2,5 cm, des os perforés de pattes de mouton vivant. En quelques semaines, les cellules osseuses ont recolonisé l'espace vide et le corail a fondu à mesure de leur progression pour leur laisser la place. «C'est la combinaison cellules souches-corail qui fonctionne, précise Laurent Sedel. Les cellules osseuses ont besoin d'un support pour combler un trou. La difficulté était de trouver le support adapté.» Les chercheurs espèrent commencer les premiers essais chez l'homme d'ici deux à trois ans. En attendant, la technique doit encore être améliorée. Pour l'instant, chez les moutons soignés par Hervé Petite, la moitié ont retrouvé un os parfaitement reconstruit. Pour les autres, les résultats ne sont pas cliniquement satisfaisants. Pour obtenir 100 % de réparations, les scientifiques vont devoir parfaire la recette de préparation des cellules souches et tester d'autres matériaux: de nouvelles espèces de coraux, mais aussi des céramiques synthétiques.

Libération :

http://www.liberation.com/quotidien/semaine/20000905mart.html

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