RTFlash

Cinq centimètres d'œsophage régénérés sans cellules-souches

Depuis le début des années 2010, plusieurs équipes tentent de nouvelles approches moins invasives reposant sur la reconstruction de l'œsophage par voie endoscopique transluminale.

Dans un article paru dans le « Lancet », le Professeur Kulwinder Dua de l'école universitaire de médecine du Wisconsin et ses collègues décrivent la première reconstruction d'un œsophage basée sur la médecine régénérative, utilisant une matrice extracellulaire et de stents disposant d'une autorisation de mise sur le marché accordée par l'Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA). Une approche presque rudimentaire, et simple à mettre en place puisque les médecins n'ont pas eu à recourir à des cellules-souches pour aider l'œsophage à « repousser » le long de la matrice.

Le patient, âgé de 24 ans, souffrait d'une discontinuité de l'œsophage de 5 cm suite à un abcès du médiastin, lui-même étant une complication d'un accident de voiture. Selon les auteurs, il était impossible de rétablir la connexion à l'aide d'un morceau du côlon ou de l'estomac car le trou à combler était trop large.

Ils l'ont donc opéré à l'aide d'un stent autoexpansible de 18 mm de diamètre et 120 mm de longueur. Le dispositif, posé via une endoscopie rétrograde, a ainsi maintenu la communication entre l'hypopharynx et le médiastin.

Dans un deuxième temps, les chirurgiens ont pratiqué une incision au niveau du cou afin de recouvrir le stent d'une matrice extracellulaire disponible dans le commerce (AlloDerm, commercialisé par LifeCell) normalement utilisée pour régénérer la peau. Cette matrice a été imprégnée d'un gel adhésif contenant un concentré de plaquettes provenant du patient, chargé de stimuler la repousse tissulaire. L'ensemble a été recouvert par le muscle sterno-cléido-mastoïdien du patient.

Au bout de 4 semaines, trois stents télescopiques articulés ont dû être posés à la place du premier stent qui s'était déplacé. Il était prévu de les retirer au bout de 12 semaines, mais le patient a souhaité différer l'opération.

Les trois stents ont été retirés au bout de 3 ans et demi, quand le patient a commencé à ressentir une gêne alimentaire et se plaindre de phénomènes de régurgitation. L'œsophage reconstitué était pleinement fonctionnel, comme l'ont montré les examens endoscopiques, la biopsie, l'échoendoscopique et la manométrie œsophagienne.

Il s'agit de la première opération de reconstruction complète d'un œsophage se basant sur cette technique pratiquée chez un humain. "Il faudra attendre longtemps avant que l'on puisse recourir à cette méthode en routine", explique le Professeur Kua. "Il faudra des essais de phase 1 et 2 très rigoureux. Notre approche est particulièrement nouvelle car elle s'appuie sur des produits déjà autorisés et ne requiert pas de phase d'ingénierie très complexe".

Les Docteurs Martin Birshall et Paolo De Coppi, de l'hôpital national d'oto-rhino-laryngologie de Londres sont frappés par la simplicité du processus : « Ces données semblent indiquer que les 5 couches de l'œsophage peuvent être entièrement régénérées sans recourir à des cellules-souches, ce qui est un résultat remarquable compte tenu de la complexité de cet organe », expliquent-ils.

Cette technique n'est pas sans rappeler la première mondiale réalisée en octobre 2012 par l'équipe du Professeur Marc Barthet, du service d'hépatogastroentérologie et oncologie digestive de l'hôpital Nord (AP-HM). Les médecins marseillais avaient procédé à une reconstruction œsophagienne par voie endoscopique transluminale sans thoracotomie et à double abord : un premier endoscope empruntant la voie buccale, et le deuxième la voie rétrograde à l’aide d’une gastrostomie chirurgicale.

Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash

Eurekalert

Noter cet article :

 

Vous serez certainement intéressé par ces articles :

Recommander cet article :

back-to-top