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Des cellules pour tolérer le soi

Les maladies auto-immunes, tels la sclérose en plaque, le diabète de type I, le lupus ou la maladie de Crohn, sont dues à une hyperactivité du système de défense qui ne tolère plus le « soi » et détruit des cellules ou des substances de l'organisme. On trouve alors chez le patient des auto-anticorps, c'est-à-dire des molécules reconnaissant comme étrangers des antigènes (des « marqueurs ») du soi. On ignore souvent les causes des maladies auto-immunes, mais des prédispositions génétiques et un facteur déclencheur (un virus, une bactérie, un antigène alimentaire, etc.) pourraient être à l'origine du dérèglement du système immunitaire. Hye-Jung Kim, de la Faculté de médecine de Harvard à Boston, et ses collègues viennent de découvrir des cellules du système immunitaire qui contrecarrent ce déréglement, en empêchant la production des auto-anticorps.

Le système immunitaire est censé défendre l'organisme contre des agents pathogènes extérieurs et des cellules du soi anormales ou cancéreuses. Pour ce faire, des cellules nommées lymphocytes B et T reconnaissent des protéines antigéniques à la surface des intrus. Elles déclenchent alors la réaction immunitaire, soit en produisant des anticorps dirigés contre les antigènes pathogènes, soit en détruisant directement l'intrus. Parfois, les lymphocytes B produisent des anticorps contre des molécules du « soi ». Ces auto-anticorps peuvent alors déclencher une réaction immunitaire « intolérante » et la maladie auto-immune s'installe.

Les lymphocytes T et B sont très nombreux et variés selon leur fonction et les récepteurs qu'ils portent à leur surface. On sait notamment que des lymphocytes T régulateurs (appartenant à la catégorie des cellules T CD4+) sont capables de limiter la réponse immunitaire quand celle-ci s'emballe, par exemple lors d'une inflammation. Les immunologistes ont désormais découvert, chez la souris, une population de lymphocytes T régulateurs dits CD8+ qui évite la production des auto-anticorps et empêche le développement d'une maladie auto-immune chez la souris.

Comment agissent ces lymphocytes T CD8+ ? Ils interagissent, via une protéine de surface nommée Qa-1, avec les lymphocytes T auxiliaires folliculaires, une autre variété de lymphocytes T CD4+ qui commandent aux lymphocytes B de produire des anticorps. Cette rencontre inhibe les lymphocytes T auxiliaires folliculaires qui ne stimulent plus les lymphocytes B ; les auto-anticorps ne sont donc plus produits.

Les immunologistes ont étudié des souris qui n'expriment plus la protéine Qa-1 des lymphocytes T auxiliaires folliculaires. Ces rongeurs développent une forme de lupus, preuve que leur système immunitaire s'est emballé et a produit trop d'auto-anticorps. En effet, les lymphocytes T CD8+ ne peuvent alors plus jouer leur rôle de régulateur et limiter l'activation des lymphocytes B. La manipulation des lymphocytes T régulateurs CD8+ peut ouvrir des perspectives thérapeutiques. En augmentant leur nombre, on limiterait des réactions auto-immunes. À l'inverse, en les éliminant, on pourrait stimuler l'immunité pour lutter contre des cancers ou des infections graves.

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