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Edito : Cancer : des avancées majeures

Malgré l’impression implacable qui nous submerge quand un être cher disparaît, emporté par le sale crabe, c’est un vent d'optimisme et d'espoir qui a soufflé cette année à l'occasion du grand congrès mondial de cancérologie (ASCO 2011) qui s'est tenu à Chicago du 4 au 8 juin. Sans vouloir être exhaustif, voici les annonces les plus encourageantes faites pendant cette rencontre qui réunissait les meilleurs spécialistes et chercheurs en matière de cancer.

S'agissant du cancer colorectal métastatique, l'agent expérimental Zaltrap (aflibercept), également connu sous le nom de VEGF Trap, améliore significativement la survie des patients atteints. Dans le traitement du mélanome, pour la première fois, deux médicaments ont permis, chacun de leur côté, d'augmenter la survie des malades souffrant de formes métastatiques. Ces deux nouvelles molécules porteuses d'espoirs agissent de façon complètement différentes. La première, le vemurafenib, développé par les laboratoires Roche, cible une mutation d'un gène appelé Braf.  En présence de cette anomalie génétique, présente dans 50 % des mélanomes, les cellules tumorales ont une croissance plus rapide. Le vemurafenib avait obtenu des résultats préliminaires prometteurs chez des malades porteurs de la mutation Braf. Ces promesses se confirment dans une étude de phase 3 (dernière étape avant la commercialisation) portant sur 675 patients qui ont reçu soit le traitement ciblé, soit de la dacarbazine. Avec un recul de quelques mois, le vemurafenib a diminué de 63 % la mortalité par rapport à la chimiothérapie, et il a permis un allongement notable de la survie sans progression de la tumeur. La seconde, l'ipilimumab (laboratoires Bristol-Myers Squibb) est un anticorps monoclonal qui stimule certaines cellules immunitaires pour aider l'organisme à éliminer les cellules cancéreuses.

Autre avancée : une étude de phase II a montré que la polythérapie Abraxane, gemcitabine et bévacizumab en traitement de première ligne des patients atteints de cancer du sein métastatique augmentait le taux de survie sans progression de 81 % à 6 mois. Toujours dans le domaine du cancer du sein, c'est une véritable révolution qui se dessine en matière de prévention : une étude publiée par le New England Journal of Medicine vient de révéler que l'Aromasine, un anti-oestrogène, réduit de 65 % le risque de cancer de sein ou de récurrence chez les femmes ménopausées. D'après les analyses menées par le docteur Paul Goss, professeur à la faculté de médecine de Harvard et principal auteur de cette étude, l'Aromasine, qui permet de mettre fin à la production d’œstrogènes, entraînerait une réduction de 65 % du risque de cancer de sein chez les femmes ménopausées. Des résultats qui pourraient avoir de profondes retombées lorsqu'on sait que "1,3 million de femmes dans le monde sont diagnostiquées annuellement comme souffrant d'un cancer du sein et que près de 500.000 en meurent", a souligné le professeur. Selon les résultats de l'essai clinique, "l'Aromasine (exémestane) est une nouvelle approche prometteuse pour empêcher le cancer du sein de survenir chez les femmes ménopausées présentant le plus gros risque d'être affectées par cette maladie", a ajouté le docteur Paul Goss.

Dans le domaine du cancer de la prostate, Celgene International Sàrl a annoncé les résultats d'une étude expérimentale de phase II de REVLIMID (lénalidomide) administré en association à Avastin (bévacizumab), au docétaxel et à la prednisone, chez des patients atteints de cancer de la prostate métastatique résistant à la castration. Au moment de la présentation, 46 des 51 patients prévus étaient inscrits à l'étude. Le taux de réponse global de l'ASP était de 86,4 % (38 patients sur 44). Plus de 70 % des patients (31 sur 44) ayant participé à l'étude ont constaté une réduction de l'ASP d'au moins 75 %. Sur 24 patients présentant des symptômes mesurables de la maladie, le taux de réponse global évalué par les critères RECIST était de 87,5 %, dont une réponse complète, 20 réponses partielles et 3 patients ayant atteint un stade stable.

Au cours de ce congrès, ont également été présentées plusieurs nouvelles familles très prometteuses de molécules anti-cancéreuses. La société Niiki Pharma a notamment présenté les données provisoires de l'étude clinique de phase I présentement en cours pour son produit principal, le NKP-1339. Le NKP-1339 est un composé anticancéreux novateur à base de ruthénium et ciblant la transferrine. Les cibles intracellulaires du NKP-1339 incluent le GRP78, un régulateur important dans la transformation de protéines mal repliées. Lors d'études précliniques, in vivo et in vitro, une activité a été démontrée contre plusieurs types de tumeur, y compris ceux qui sont résistants à d'autres agents anticancéreux.

Une autre molécule mise au point par une équipe de l'Inserm au Centre de recherche en biochimie macromoléculaire (CNRS/Université de Montpellier 1 et 2) permettrait de pallier les phénomènes de résistance développés lors de certaines chimiothérapies. La molécule UA62784 serait capable d'empêcher in vitro la prolifération des cellules cancéreuses et de provoquer ainsi leur mort cellulaire. Son effet amplifierait celui d'autres molécules anti-cancéreuses actuellement utilisées cliniquement. Cette molécule bloque la division des cellules cancéreuses, et les oriente majoritairement vers la mort cellulaire. Des expériences complémentaires ont montré qu'associée à d'autres molécules déjà utilisées cliniquement en chimiothérapie, UA62784 peut amplifier leur action. Enfin, les doses efficaces d'UA62784 sont beaucoup plus faibles que celles administrées avec les médicaments actuels. Traiter avec cette molécule permettrait donc de diminuer l'apparition de résistance aux chimiothérapies.

Mais au-delà de ce congrès, les prochaines avancées majeures attendues à moyen terme en matière de cancérologie viendront sans doute des nanotechnologies et le CNRS est en pointe dans ce domaine de recherche visant à utiliser des "nanovecteurs" pour combattre le cancer. La première équipe, du Centre de recherche en automatique de Nancy (Cran) et du Centre de lutte contre le cancer Alexis-Vautrin, expérimente des nanoparticules capables de détruire les tumeurs cérébrales grâce à la thérapie photodynamique : « Cette stratégie thérapeutique consiste à injecter au patient une molécule photo-activable qui, en présence de lumière, réagit avec l’oxygène moléculaire présent dans les tissus. Il se forme alors des espèces réactives de l’oxygène, qui détruisent les tissus cancéreux ciblés », explique Muriel Barberi- Heyob, chercheuse au Cran. Les nanoparticules utilisées ont une taille inférieure à 10 nanomètres et sont composées de trois éléments. Elles possèdent tout d’abord, greffés à leur surface, des peptides ciblant un récepteur surexprimé par les vaisseaux sanguins qui nourrissent les tumeurs agressives, où les nanoparticules vont ainsi s’accumuler. Elles possèdent également un agent de contraste, molécule permettant de les repérer à l’aide d’une IRM et d’obtenir ainsi une image en Fichiers communs de la tumeur afin de guider une fibre optique jusque dans la zone malade.

Avec ces deux constituants, tout est prêt pour commencer la thérapie photodynamique : la fibre optique apporte la lumière à la molécule photo-activable qui, par l’intermédiaire des espèces réactives de l’oxygène produites, détruit les vaisseaux sanguins cancéreux. La tumeur, privée de nutriments et d’oxygène, est alors en théorie sérieusement mise à mal. Pour le moment, ces recherches en sont encore au stade de l’expérimentation animale.

La seconde équipe, du Laboratoire de chimie des polymères organiques (LCPO), à Bordeaux, travaille à la conception de vecteurs intelligents, véhicules capables de transporter une drogue anticancéreuse et de la libérer dans la tumeur. « En ciblant très précisément la tumeur, on peut considérablement réduire les effets secondaires des chimiothérapies », explique Sébastien Lecommandoux, chercheur au LCPO. Les vecteurs confectionnés par les chercheurs sont des nanoparticules d'une centaine de nanomètres composées de polymères capables de transporter toutes sortes de molécules actives. Ils contiennent aussi des nanoparticules magnétiques d’oxyde de fer, dont le rôle est de guider à l’aide d’un aimant jusque dans la tumeur.

On voit donc qu'à coté des grands outils thérapeutiques "classiques" utilisés contre le cancer, chirurgie, chimiothérapie, immunothérapie et radiothérapie qui ne cessent de faire des progrès et d'être associés et combinés de manière toujours plus efficace, les nanotechnologies, associant physique, chimie et biologie, vont permettre de disposer de nouveaux et puissants moyens de lutte contre les cancers. Dans ce contexte scientifique, il est capital que notre pays, qui a la chance de posséder des équipes de recherche remarquables dans ces domaines d'avenir, intensifie son effort global de recherche fondamentale pour développer ces outils et technologies de rupture qui permettront demain de remporter des victoires décisives contre ce fléau.

René TRÉGOUËT

Sénateur Honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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  • Mumen

    18/06/2011

    Intox par ommission.

    Plus on avance dans la recherche contre le cancer, plus on trouve des ruses par hasard, des chimies par intérêt, des prétendues préventions par statistiques et moins on avance vraiment vers une véritable prophylaxie du cancer, une véritable compréhension générale. La médecine n'a jamais guéri un seul cancer : elle en éradique les symptômes et s'auto proclame championne de la santé, alors qu'elle n'est championne que de sa propre conservation.

    Ce genre d'étude d'experts, que colporte sans posture critique la lettre flash, fait systématiquement l'impasse sur les intelligences de pensée à l'oeuvre ailleurs dans la science, à sa marge. Par exemple Collin T Campbell pour la relation entre nutrition et ce qu'il nomme les maladies du confort dont le cancer est la plus meurtière ; autre exemple, Valter Longo pour la forte diminution des effets secondaire de la chimiothérapie ainsi que l'augmentation de leur efficacité à l'aide d'un jeûne contrôlé.

    Les seules avancées de la science reconnues sont pointues, analytiques et sujettes à brevets. Les avancées synthétiques, à portée universelle sont soit tues, soit décrédibilisées "en passant" par l'ensemble de la chaîne qui va de la science à l'information. La lettre Flash ne dessert pas cet a-priori et ce n'est pas à son honneur.

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