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Une bibliothèque de protéines contre les maladies émergentes

Prendre un coup d'avance sur les épidémies de demain en constituant dès maintenant une bibliothèque regroupant les «modes d'emploi» des principales protéines virales : c'est l'audacieux pari que s'apprêtent à relever une vingtaine d'équipes allemandes, britanniques, italienne, slovaque, belge, suédoise et française. Baptisée projet «Vizier», cette initiative est portée par le laboratoire marseillais du CNRS «Architecture et fonctions des macromolécules biologiques» (AFMB) et soutenue par l'Union européenne. Son credo : une connaissance fine des complexes molécules impliquées dans la transmission et la multiplication des germes dangereux pourrait faciliter la mise au point de drogues antivirales efficaces - pour l'heure très peu nombreuses. Contrairement à la plupart des infections bactériennes, qui répondent au moins partiellement aux antibiotiques existants, les grandes maladies virales prospèrent en effet dans un quasi-désert thérapeutique. Et dans le même temps, de nouveaux micro-organismes viennent régulièrement grossir les rangs des virus dangereux pour l'homme - contre lesquels la recherche de molécules thérapeutiques par «screening» des composés existants a montré des limites. «Dans ce maquis de germes nouveaux ou mal contrôlés, la récente chronique des maladies émergentes nous a incités à nous intéresser en priorité aux virus composés d'ARN (acide ribonucléique), explique Christian Cambillau, coordinateur de «Vizier». Cette famille, qui compte plus de 200 organismes pathogènes pour l'homme - notamment ceux de la dengue, de la gastro-entérite, de la rougeole, des entérovirus ou encore de la grippe -, semble en effet particulièrement mal dotée en médicaments efficaces.» C'est pour tenter de mettre un terme à cette pénurie que plusieurs dizaines de virologues et biologistes moléculaires s'apprêtent à plancher de concert sur la structure et le fonctionnement des protéines composant les principaux virus ARN. Leur projet repose sur un postulat actuellement très répandu parmi les biologistes : bien plus que le décryptage du génome viral, jugé peu exploitable en l'état, la compréhension du rôle de certaines protéines composant les pathogènes serait au coeur de la recherche visant à identifier des candidats médicaments. «Or depuis l'entrée dans l'ère post-génomique, explique Christian Cambillau, nous disposons des moyens nécessaires pour caractériser à haut débit la structure en trois dimensions - et donc la fonction - de nombreuses protéines.» Ce travail repose sur la mise à contribution de diverses spécialités. En amont, le séquençage de virus vivants dans un laboratoire sécurisé constitue un préalable indispensable à la production des protéines recherchées. Il faut en effet disposer de la séquence du gène correspondant qui, une fois «exprimée» par une bactérie - l'AFMB utilise notamment Escherichia coli -, génère les molécules désirées. Isolées par un système de «tamis» puis multipliées, celles-ci finissent par former un cristal. Dernière étape : l'étude aux rayons X des formes cristallines ainsi obtenues permet, après traitement informatique, de déduire la structure en trois dimensions de la protéine étudiée. Cette description posée, les chercheurs pensent être en mesure d'identifier les sites actifs des protéines qui, au sein d'un virus, composent le complexe de réplication. «Ce qui revient à cibler, grâce aux images obtenues, des fragments de molécules auxquels un candidat médicament devra s'attaquer en priorité pour empêcher le virus de se multiplier à l'intérieur d'une cellule, décrypte le docteur Vincent Deubel (laboratoire P4 de Lyon), partenaire de «Vizier». Une approche autrement plus scientifique que celle employée lors des essais répétés - et infructueux - de médicaments sur les virus d'Ebola ou de la fièvre de Congo-Crimée.» «Plus les spécialistes de biologie structurale décriront des protéines et plus ils seront susceptibles d'esquisser rapidement des comparaisons avec les molécules qui composeront demain les virus émergents», observe pour sa part Jean-Claude Manuguerra, virologue à l'Institut Pasteur. l fut un temps où la création d'un bébé mammifère ne pouvait se réaliser sans deux éléments essentiels, l'ovule et le spermatozoïde. Cette époque est maintenant derrière nous puisque des chercheurs japonais ont réussi à obtenir la naissance d'une souris sans ces ingrédients ni clonage. La souris Kaguya, dont le matériel génétique est exclusivement d'origine femelle, est présentée par une équipe de l'université d'agriculture de Tokyo comme le premier mammifère sain et fertile, arrivé à l'âge adulte, obtenu par parthénogenèse, un mécanisme de reproduction asexué. Le terme parthénogenèse, du grec « né d'une vierge », est un mode de reproduction rencontré chez les pucerons, certains poissons, les lézards et même quelques espèces de dinde. En fait, la souris née des travaux de l'équipe japonaise coordonnée par Tomohiro Kono (université d'agriculture de Tokyo) "n'est pas un clone, mais elle n'est pas non plus une souris parthénogénétique" véritable, a commenté pour l'AFP Jean-Pierre Ozil, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra). "Elle a deux mères génétiques et une mère porteuse", a précisé Jean-Pierre Ozil. En effet, "les parthénogenèses artificielles effectuées dans les laboratoires sont des activations d'oeufs non fécondés", a-t-il ajouté en reconnaissant "l'intérêt majeur" de ces recherches. De tels travaux apportent en effet de précieuses informations sur les empreintes parentales, c'est-à-dire sur les rôles différents et complémentaires de gènes portés par les chromosomes paternels et maternels sur le développement de l'embryon. Ces recherches donnent notamment des explications sur l'impossibilité d'une parthénogenèse naturelle chez les mammifères, Selon Tomohiro Kono, cette nouvelle technique pourrait être utilisée à des fins agricoles et scientifiques. Des experts y voient, eux, d'éventuelles implications dans le traitement de maladies par le biais de cellules isolées.

Figaro : http://www.lefigaro.fr/sciences/20040414.FIG0321.html

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